L’évènement n’est pas passé inaperçu. Il a enflammé les réseaux sociaux vendredi 7 décembre. Parallèlement au mouvement des gilets jaunes, 153 personnes entre 12 et 20 ans, lycéens et autres, ont été interpellés jeudi 6 décembre pour actes de violence commis en marge des blocages de deux lycées à Mantes-la-Jolie dans une zone pavillonnaire près de la cité du Val-Fourré. Nos apprentis casseurs ont usé de toute la panoplie de la petite délinquance : poubelles incendiées, projectiles lancés sur les forces de l’ordre le mardi 4 décembre, feux de barricades, jets de pierres et de cailloux sur les policiers le mercredi 5 décembre. Le jeudi matin, comme on ne s’en lasse pas, poubelles incendiées, deux véhicules partis en fumée, et bien sûr blocage de l’entrée du lycée. Nos jeunes apprenants auraient volontiers renouvelé leur exploit de la veille pour les attirer les policiers vers le Val-Fourré où un sympathique comité d’accueil les attendait certainement. Enfin l’accident bête, notre joli petit monde se retrouve coincé, pris en tenaille par des policiers en tenue qui commençaient peut-être à trouver un peu gênant de se faire narguer par des morveux de 15 ans.
Puis les images que nous connaissons. Séquence indignation sur les réseaux sociaux : « Glaçant », « Ce n’est pas cela la République », entonne un Benoît Hamon indigné, « Pas en France », glandes lacrymales mises à rude épreuve, cœurs liquides qui chavirent, tirez vos mouchoirs : enfance en danger. 153 petits morveux pyromanes ayant pris du bon temps pendant quelques jours et qui se retrouvent – enfin – à genoux, mains sur la tête, immobiles, en ordre serré.
Ces images ont eu une excellente charge symbolique. Il s’agit d’une reconquête à plusieurs titres.
Reconquête du respect de l’uniforme. Les jeunes délinquants s’agenouillent devant le représentant de la puissance publique qu’ils ont provoqué et outragé de manière éhontée la veille et l’avant-veille. Ils sont humiliés et cela est une excellente réponse à l’arrogant sentiment d’impunité dont ces jeunes font preuve depuis bien trop longtemps. Et l’impunité est un sentiment aussi contagieux qu’une vilaine grippe : cela défait la confiance en la solidité des institutions, fragilise notre édifice social.
C’est la destitution du casseur-roi et celle de l’enfant-roi, qui sont tout à la jouissance de la destruction gratuite. L’enfant tyrannique qui domine les adultes et les institutions est une catastrophe pour la civilisation européenne qui meurt de la disparition du père et des figures d’autorité. Cette opération policière a, le temps d’une interpellation, redonné le sens de l’autorité publique et remis la virtusau cœur de l’action publique.
Bien sûr la bienveillance stupide sortie par la porte est revenue par la fenêtre dans sa version constitutionnalisée qu’est le Défenseur des Droits : celui-ci n’a pas manqué évidemment d’ouvrir une enquête pour vérifier les « conditions dans lesquelles se sont déroulées les interpellations » de ces pauvres choux afin de « veiller au respect de la déontologie » dans « l’intérêt supérieur de l’enfant ». Les « enfants » peuvent encore espérer que les actes insultants à l’encontre des représentants de l’ordre soient versés au rang de droitdelhomme.
Malgré cela, le bien est fait : chacun, l’enfant, l’adulte, est retourné à sa place, l’espace d’une instant…