Affaires extérieures, Chroniques

La Palestine aujourd’hui, un Projet sans territoire.

Si le conflit israélo-palestinien repose bien sur une question de répartition territoriale depuis 1947, la « Palestine » dont il est question dans les manifestations qui ont eu lieu samedi 15 mai dans plusieurs villes de France, n’est pas à proprement parler un territoire.

La Palestine fut la terre des Philistins disparus, qui lui ont possiblement donné son nom, celle des Grecs, des Juifs, des Romains, des Arabes, des Chrétiens, des Ottomans. Elle fut un territoire sous mandat britannique. La Palestine n’a jamais pu s’incarner dans un peuple qui en aurait assuré la perpétuation historique, n’a jamais vraiment été un Etat sous ce nom, si ce n’est à l’époque romaine, la Syrie palestine (Syria Palestina) instaurée par l’Empereur Hadrien pour occulter le nom de la Judée et répondre notamment à la révolte de Simon Bar Kokhba. La Palestine d’aujourd’hui est une « Autorité », a un drapeau, mais elle est à bien des égards une construction politique et idéologique qui obéit à des objectifs clairement déterminés.

Force est de constater que la « Palestine » est un dispositif essentiel pour favoriser la constitution de la Oumma dans le monde. Elle en est même le creuset puisque la présence exclusive de l’Islam à Jérusalem, à Bethléem, à Nazareth acterait le remplacement du judaïsme et de la chrétienté par une religion régénérant la spiritualité du monde, chassant les faux prophètes. Le Projet Tamkine des Frères musulmans trouve dans la question palestinienne un relai symbolique auprès des populations arabes et musulmanes des pays européens. Elle est une sorte d’énergie régénératrice qui permet d’entretenir la rivalité spirituelle et civilisationnelle avec la civilisation judéo-chrétienne. Ne pas voir cette charge symbolique de la Palestine revient à occulter l’habile stratégie de conquête mondiale déployée par l’Islam.

Car la Palestine est autant voire plus une question européenne qu’une question moyen-orientale. Lorsque des personnes crient « Allahou akbar » dans les rues de Paris, lors d’une manifestation pourtant théoriquement interdite, que disent-ils ? Il n’ « importent » pas le conflit israélo-palestinien en Europe, comme je l’entends trop souvent, mais ils affirment la légitimité territoriale de l’Islam non seulement en Israël mais dans l’ensemble des pays européens qui sont des pays « musulmans » en attente de conversion, de gré ou de force.

La Palestine d’aujourd’hui est une idée, un concept, un mot, un Projet mais en aucun cas un territoire. A vrai dire, cela fait longtemps que « Palestine » est un sème qui provoque des réflexes pavloviens.  La guerre de communication, la guerre des morts et des larmes dont le Hamas est devenu un spécialiste reconnu sont relayées et alimentées par des médias complaisants en France comme Le Monde diplomatiqueMédiapart ou Libération et plus globalement toute la presse de gauche. Aveuglés par leur mépris de la culture juive et chrétienne, ces thuriféraires de l‘ « immigration, chance pour la France » voient depuis les années 90 dans l’Islam une régénération possible de l’Occident finissant. C’est évident pour l’extrême-gauche pour laquelle les Musulmans sont les sans-culottes de la postmodernité. C’est plus subtil pour l’extrême-centre (de LFI à une partie de LR) qui considère l’Islam compatible avec la République parce qu’il évacue la France du champ politique et fait semblant d’oublier que la francité est animée d’un habitus historique – l’hellénité, la romanité, le christianisme, le gnosticisme révolutionnaire même –  dont l’Islam est totalement absent. 

La Palestine est devenue, dans l’imaginaire des Musulmans, aussi déterritorialisée que ne l’est la Oumma. Elle est un drapeau que les « jeunes » des « quartiers populaires » dessinaient déjà, en France, sur leur carnet de correspondance à la fin des années 90. Elle est le drapeau que l’on arborait, en 2002, lors de l’élection de Jacques Chirac contre Jean-Marie le Pen, sous le regard d’ailleurs médusé de Bernadette Chirac, la Palestine venant accompagner les odes à la République sauvée…. Elle est le drapeau que l’on ressort lors de manifestations contre l’islamophobie en 2019 sous l’égide éclairée de Yassine Belattar qui déclare en toute simplicité, à propos de l’islamisation, que la France « doit s’habituer ».  Elle est cette patrie sans territoire et sans peuple et d’une certaine manière doit le rester pour demeurer la préfiguration symbolique de la Oumma, ce que n’était pas le Califat de l’Etat islamique qui souhaitait se territorialiser pour conquérir notamment les républiques laïques arabes et les islamiser. C’est pourquoi leurs revendications pour un territoire palestinien prêteraient à sourire si elles ne s’accompagnaient d’un antisémitisme expressément formulé. 

La Palestine est un signe, elle n’est que cela mais elle est tout cela. C’est en cela qu’elle est déjà profondément européenne. Son drapeau est autant celui d’un territoire arabe au Moyen-Orient que celui de notre colonisation, de notre remplacement spirituel, culturel, civilisationnel. Malheureusement, cette guerre n’a pas à être importée. Elle est déjà notre guerre…

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