Chroniques

21 mai 2018 : Peut-on vraiment prendre au sérieux les monarchistes ?

Je passerai sous silence les raisons de la fatigue républicaine qui a saisi notre pays depuis quelques décennies et qui est de plus en plus palpable. Notre site tente d’en analyser les raisons et propose une issue à cette apathie républicaine qui préfigure la décadence tragique de notre grande civilisation et la substitution mortifère et colonisatrice d’une culture exogène. L’incarnation de la cité par la figure du roi me semble être à même de résoudre l’hiatus croissant entre les Français et leurs élus, désacralisés a priori précisément parce qu’ils sont élus et que leur légitimité ne procède que de la vox populi.

La réintroduction dans la sphère politique d’une part de transcendance, de mystère paraît répondre à cette crise lancinante du politique réduit à l’immanence, à l’administration des choses, au management des hommes, à la rationalisation entrepreuneuriale. Que le corps politique procède de quelque chose qui n’est pas lui est essentiel. Seul le roi peut rassembler en lui cette part profane et cette part sacrée dont le politique a besoin et dont il se nourrit encore aujourd’hui.

La sacralité politique existe dans les démocraties libérales et dans les républiques. La spectacularisation des élections ressemble à s’y méprendre à une onction par les médias. La photographie présidentielle s’inscrit dans la tradition du portrait royal. La vie médiatique des présidents de la République est orchestrée dans une symbolique monarchique : le passage de Valéry Giscard d’Estaing chez les Français dans les années 70, les échanges des poignées de main ou les émissions politiques à « l’écoute des Français » sont une traduction moderne de la guérison des écrouelles par le roi qui écoute, touche, console, guérit. Une guérison psychologique bien sûr adaptée à notre siècle hystérique et psychotique. Les institutions même de la Vème République, dans la promulgation des lois par le Président de la République, par ses prérogatives exorbitantes de droit commun à l’article 16 relèvent de cette essence monarchique.

Sauf que cette sacralité républicaine est une parodie farcesque de la geste monarchique et n’est qu’une coquille vide.

Je me permettrai une phrase simple et de bon sens : ne vaut-il pas mieux l’original à la copie ? La République française  n’est-elle pas dans une dénégation – au sens quasi-freudien – où elle fuit le père qu’elle a tué ? Elle a enfanté un roi sans monarchie, un lieutenant sur terre sans Dieu, elle a instauré une séparation étanche entre le ciel et la terre à travers le concept de laïcité tel en tous cas qu’il est compris aujourd’hui. Veut-on cette ombre du roi qui condamne la France à l’impuissance bavarde et la bienveillance forcée ?

Alors peut-on prendre au sérieux les monarchistes ?

La pratique du pouvoir monarchique est liée à une vision théâtrale – nécessaire – du pouvoir et de son incarnation. Cette dimension de représentation est accentuée, c’est vrai, dans le régime monarchique et il est tout à fait possible d’envisager les monarchistes comme des nostalgiques d’un folklore sympathique et suranné mais qui n’est investi d’aucun sens politique.

Or, le pouvoir s’incarne, se donne à voir. Dans ce spectacle qui a d’ailleurs  toujours existé, il faut voir non un folklore mais une mise en scène qui est consubstantielle à l’essence du pouvoir. Le Roi met en scène du visible et suggère l’invisible. C’est en cela que réside sa grandeur et la confiance de son peuple comme l’a montré Louis XIV, un modèle dans l’art de l’incarnation du sacré dans la vie publique, à travers les arts par exemple.

Le choix monarchique est un choix sérieux, motivé par une analyse du politique dont l’essence réside dans l’incarnation de la grandeur.

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